Le 25 juin j'ai couché avec Cecil. Il y a des dates qu'il faut noter. Voilà quatre jours que j'essaie de raconter. J'ai écrit « le 25 juin j'ai couché avec Cecil » une dizaine de fois. Toujours la première phrase, mais la suite ne vient pas. Deux récits de cet après-midi existent déjà pourtant : celui, mouvant, modelé chaque instant dans ma tête, parsemé d'images, de sensations. Le deuxième récit est dans mon journal. Il est linéaire, sans froufrous, je raconte tout, pour me souvenir. Parce que je ne voudrais pas que cet après-midi se perdent parmi les autres corps que j'ai touché. Je relis ce texte et je rougis, devant les mots que j'utilise, des mots crus, parce qu'il faut nommer les choses telles qu'elles sont parfois. Alors j'écris gode, j'écris lèche, j'écris langue et j'écris clitoris, même si ce sont des mots qui ne me ressemblent pas. Certains je les écrivais pour la première fois. Ecrire un mot pour la première fois … L'impression de se tenir au bord de la falaise !
Mais ce récit, comme celui que j'écris heure après heure dans ma tête, est privé.
Cela dit : j'étais allongée là et je me laissais faire, ça me faisait bizarre de ne pas rendre le plaisir reçu. C'était inhabituel qu'on s'occupe de moi et qu'on me caresse sans rien attendre en retour. J'ai un peu touché sa peau mais ça n'est pas ce qu'il attendait je crois alors j'ai vite arrêté, je me suis contentée de me concentrer sur mon propre corps.
C'était doux et terriblement intime pour un service entre potes.
Voilà deux jours que j'y repense par intermittence, et avec les images revient le désir. Quand il m'appelle je ne lui en parle pas, c'était seulement pour une fois, c'était ça le marché. Il n'a jamais été concrétisé par des mots, pourtant ils ont été gravé quelque part à l'instant où il a dit : on pourrait aller chez moi et coucher ensemble.
Nous étions assis sur la pelouse d'un parc près de la Gare de l'Est à parler de nous. Je me débarrassais de toute la peine accumulée, je lui parlais de ma frustration et lui me parlait de sa famille et de sa solitude. Cecil c'est un garçon dans un corps de fille, complexe et indescriptible, tellement différent de tous ceux que j'avais croisé jusque là. Il a enlevé un e à son prénom, et je ne l'ai jamais connu fille. C'est un ami de mon ex-copine, et la première fois que je l'ai vu j'ai cru que c'était son petit frère. D'une certaine manière cette première impression perdure, j'ai envie d'en prendre soin, l'affection prend le pas sur l'agacement passager : il est geignard parfois.
Je ne me souviens plus bien de nos phrases et des histoires échangées, mais tout à coup Cecil m'a dit : on pourrait aller chez moi et coucher ensemble. Jamais je n'aurais imaginé qu'il me dise une telle chose cet après-midi-là, mais quand il a dit ces mots j'ai senti une chaleur et une envie grandir dans mon sexe, quelque chose que je n'avais jamais ressenti à son encontre et qu'il m'aurait paru absurde de laisser s'échapper. C'est pour ça que j'ai dit oui. Sans plus réfléchir à ce que ça ferait à notre amitié, j'ai dit oui. À vrai dire j'avais accepté dans ma tête bien avant de lui faire savoir, pour m'habituer à l'idée avant de plus m'y avancer. Il parlait à toute vitesse à côté de moi pour combler mon silence, et j'étais rassurée de le savoir gêné, lui aussi.
C'était à la fois anodin – deux corps qui se croisent – et complètement surréaliste. Je n'avais jamais imaginé le moment avant de le vivre ; pour moi qui fantasme jour et nuit, qui invente des histoires sans relâche, qui envisage chaque possibilité avant de me jeter à l'eau, c'était très nouveau.
Je n'avais jamais couché avec quelqu'un sans lui faire l'amour. Je ne l'ai même pas vu nu, Cecil. Un service entre potes. J'en reviens pas.
Je dois avouer que je ne sais pas bien quoi penser de ce texte. L'intérêt littéraire me paraît limité, et le texte dans son entier me semble bancal. C'était vraiment difficile d'écrire ça ! Donc je voudrais bien des avis éclairés. Merci !
Et, aucun rapport, mais allez jeter un coup d'oeil ici : http://legrandcombat.blogspot.fr/ ça vaut le détour ; c'est une bande-dessinée, à lire sur la page de haut en bas. C'est éblouissant.
Je pense qu'il y a dans l'humanité beaucoup d'amours sans sexe que d'amour "achevé" par le sexe... Sinon, jamais les personnes très âgées ni les enfants ne pourraient aimer... Alors qu'ils aiment...