Voilà une semaine que je rêve que je trompe Jules avec une femme. Ce ne sont pas des rêves de peaux et de souffles, mais des rêves laborieux, le corps figé face à une femme inquisitrice. La femme change, le visage d’une nuit c’est Lena c’est Céline c’est Marine c’est des femmes des filles et des gamines du passé. Qui sont-elles aujourd’hui ? Cela me frappe soudain ces corps nus ou ces corps que j’ai laissés derrière moi sans un regard. Salut, et je fais mes pas seule, loin, le plus loin possible, sur un chemin dont elles s’éloignent chacune de leur côté. Même pas « coucou, comment tu vas, où t’en es ? », pas que ma faute, pas que ma faute hein les filles. Mais un peu. J’ai les yeux rivés sur mon but et mon nombril, même à Jules je dis : tu passeras toujours après ce que je fais. Marion sans coeur. J’aime et puis j’aime plus. Jules ça dure, j’aime, peut-être que jamais autre chose. Mais la nuit, le sommeil et le sexe avec une femme.
Mercredi 18 mars 2015 à 18:16
Quelques textes effacés et d’autres mis au secret, j’aimerais comprendre mes sentiments et cette colère
— un peu plus fade aujourd’hui mais c’est parce que je ne m’y plonge plus les poings en avant et les yeux fermés
j’ai pas tout compris et pas sure que je veux comprendre
maintenant que c’est plus fade aujourd’hui
y réfléchir c’est réveiller la bête bête et méchante dans la grotte
ma grotte
ça sonne sexuel
mais rien n’est sexuel ces derniers temps
la dernière fois qu’on a fait l’amour c’était pas l’amour
c’était vaseux pâteux et ennuyeux, un orgasme faiblard et si rapide que je l’ai pas senti, juste pensé
il m’écrasait j’avais une crampe et on s’est couché collants et frustrés
lui aussi parce que j’ai pas eu envie de le faire jouir
pas l’odeur de son foutre dans les draps non merci
il m’a dit : demain pour me rattraper en rentrant du boulot je te mangerai la chatte
mais le lendemain j’ai pas enlevé mon pantalon
j’ai fait comme si tout allait bien, on a mangé des restes, je l’ai embrassé à la hâte et je suis partie
à la hâte.
— un peu plus fade aujourd’hui mais c’est parce que je ne m’y plonge plus les poings en avant et les yeux fermés
j’ai pas tout compris et pas sure que je veux comprendre
maintenant que c’est plus fade aujourd’hui
y réfléchir c’est réveiller la bête bête et méchante dans la grotte
ma grotte
ça sonne sexuel
mais rien n’est sexuel ces derniers temps
la dernière fois qu’on a fait l’amour c’était pas l’amour
c’était vaseux pâteux et ennuyeux, un orgasme faiblard et si rapide que je l’ai pas senti, juste pensé
il m’écrasait j’avais une crampe et on s’est couché collants et frustrés
lui aussi parce que j’ai pas eu envie de le faire jouir
pas l’odeur de son foutre dans les draps non merci
il m’a dit : demain pour me rattraper en rentrant du boulot je te mangerai la chatte
mais le lendemain j’ai pas enlevé mon pantalon
j’ai fait comme si tout allait bien, on a mangé des restes, je l’ai embrassé à la hâte et je suis partie
à la hâte.
Dimanche 1er mars 2015 à 11:09
Je me suis fait plaisir tout à l’heure, vite et bien, facile et propre, une affaire précise et presque sans émotion. Détachée, alors que le plaisir venait vite et bien, facile et propre. Détachée, tellement que ça n’a pris que 15 secondes à tout casser, pas même le temps de me sentir sensuelle ou d’imaginer du sexe. Geste thérapeutique, à plat ventre sur mon lit, pour évacuer le stress et la colère résiduelle qui m’empêchait de me concentrer. C’est monté, monté, progressivement, en une courbe prévisible mais délicieuse, et puis plus rien — à peine le temps de me dire « c’est délicieux », ça ne l’était plus. J’ai retiré le tissu roulé en boule que j’avais glissé sous mes hanches, je me suis remise en ordre, défroissant rapidement ma chemise, je me suis rassise et j’ai repris mon livre.
Samedi 28 février 2015 à 22:34
Mon père toussote devant les passages « olé olé » de Goodmorning England, mais il rigole aussi, et je rigole, et nous chantons sur les Kinks et sur Leonard Cohen, et ma mère qui travaille à son bureau dit Ah c’est fin votre film !
mais seule à présent dans mon lit
à vingt-deux heures trente alors qu’ils sont tous les deux à leur bout de couloir
(l’indécence qu’il y a de les imaginer tous les deux derrière la porte close)
j’ai rigolé aux passages sur le sexe et ce fut comme un aveu, un aveu superflu car voyons papa, maman, que voulez-vous que je fasse la nuit dans le lit de Jules : je connais un peu le sexe, comme un vieil ami dont on ne connait pas la vie secrète malgré tout, qui réserve des surprises encore et qu’on aimerait rendre un peu plus fou, un peu moins conventionnel parfois.
Il y a encore la gaieté de la soirée dans mes gestes, et la gêne un peu aussi. Je suis rentrée chez mes parents pour une semaine et il y a les choses à raconter les vieilles blagues à rééchanger, et c'est assez simple juste pour un soir et
la gaieté mais la gêne d’être un peu trop gaie aussi, je m’attends à me faire reprendre d’un moment à l’autre, comme quand
dans la voiture après une boum maman disait, en voyant mes joues rouges et mes yeux brillants, avec son ton réprobateur : tu m’as l’air bien excitée dis donc, et tout redescendait d’un coup, moi je venais de donner mon premier baiser pourtant.
mais seule à présent dans mon lit
à vingt-deux heures trente alors qu’ils sont tous les deux à leur bout de couloir
(l’indécence qu’il y a de les imaginer tous les deux derrière la porte close)
j’ai rigolé aux passages sur le sexe et ce fut comme un aveu, un aveu superflu car voyons papa, maman, que voulez-vous que je fasse la nuit dans le lit de Jules : je connais un peu le sexe, comme un vieil ami dont on ne connait pas la vie secrète malgré tout, qui réserve des surprises encore et qu’on aimerait rendre un peu plus fou, un peu moins conventionnel parfois.
Il y a encore la gaieté de la soirée dans mes gestes, et la gêne un peu aussi. Je suis rentrée chez mes parents pour une semaine et il y a les choses à raconter les vieilles blagues à rééchanger, et c'est assez simple juste pour un soir et
la gaieté mais la gêne d’être un peu trop gaie aussi, je m’attends à me faire reprendre d’un moment à l’autre, comme quand
dans la voiture après une boum maman disait, en voyant mes joues rouges et mes yeux brillants, avec son ton réprobateur : tu m’as l’air bien excitée dis donc, et tout redescendait d’un coup, moi je venais de donner mon premier baiser pourtant.
Mercredi 25 février 2015 à 22:54
Fin d’après-midi. Je profite du soleil qui tombe sur mon bouquin et mon visage, dans le salon, sur mon fauteuil jaune et sur le bureau derrière. Ma grand-mère vaque. On sonne. « T’y vas ? » me crie-t-elle depuis la cuisine. Je grogne et j’attends un peu ; elle y va.
Depuis ma place, je ne vois pas l’encadrement de la porte. C’est un homme. Une femme ? Non, un homme parle à ma grand-mère. J’entends à peine sa voix, juste un murmure, l’écho des basses ; la tessiture se perd. D’ici c’est calme, doux, plaisant. Attirant. L’échange dure, ce n’est ni un livreur, ni le facteur, ni une erreur. Je me rapproche, intriguée par l’attitude de ma grand-mère. Elle est soudain plus droite, plus attentive, plus présente. Je saute du fauteuil jaune au fauteuil bleu, perds le soleil mais gagne en visibilité. Une main posée sur l’épaule de ma grand-mère, un jeune homme plaisante ou raconte. Ou embobine. Son visage franc et ouvert m’inspire presque immédiatement confiance pourtant. Ni tout à fait beau, ni disgracieux, une asymétrie dans le menton, un sourire de travers, spontané et généreux, il doit en jouer le samedi soir. Appuyé nonchalamment sur le chambranle, l’homme est sobrement vêtu d’un jean bleu foncé et d’une chemise blanche immaculée, remontée aux manches malgré le vent frais qui m’a fait frissonner sur le balcon. Un charmeur. De mon perchoir, dissimulée par le dossier et tout à fait immobile, je regarde de tous mes yeux, écoute de tout mon ventre et regrette de ne pas être allée ouvrir. Mais un seul geste et l’équilibre change, ma grand-mère se rapproche, l’embrasse sur la joue, le jeune homme rougit et je voudrais ne pas être là.
Depuis ma place, je ne vois pas l’encadrement de la porte. C’est un homme. Une femme ? Non, un homme parle à ma grand-mère. J’entends à peine sa voix, juste un murmure, l’écho des basses ; la tessiture se perd. D’ici c’est calme, doux, plaisant. Attirant. L’échange dure, ce n’est ni un livreur, ni le facteur, ni une erreur. Je me rapproche, intriguée par l’attitude de ma grand-mère. Elle est soudain plus droite, plus attentive, plus présente. Je saute du fauteuil jaune au fauteuil bleu, perds le soleil mais gagne en visibilité. Une main posée sur l’épaule de ma grand-mère, un jeune homme plaisante ou raconte. Ou embobine. Son visage franc et ouvert m’inspire presque immédiatement confiance pourtant. Ni tout à fait beau, ni disgracieux, une asymétrie dans le menton, un sourire de travers, spontané et généreux, il doit en jouer le samedi soir. Appuyé nonchalamment sur le chambranle, l’homme est sobrement vêtu d’un jean bleu foncé et d’une chemise blanche immaculée, remontée aux manches malgré le vent frais qui m’a fait frissonner sur le balcon. Un charmeur. De mon perchoir, dissimulée par le dossier et tout à fait immobile, je regarde de tous mes yeux, écoute de tout mon ventre et regrette de ne pas être allée ouvrir. Mais un seul geste et l’équilibre change, ma grand-mère se rapproche, l’embrasse sur la joue, le jeune homme rougit et je voudrais ne pas être là.
Vendredi 16 janvier 2015 à 19:17