Je guette un peu dans ma poitrine ; parfois ça se secoue, ‘y a un peu du noir qui déborde dans ma bouche, pas de la bile c’est plutôt doux-amer, l’aigreur c’est plus vraiment mon truc. Une vieille habitude de crisper mon corps pour contrer la douleur, quand les blessures sont déjà pansées.
Il y a un petit blond sur mon canapé - enfin, petit, mes yeux sont à la hauteur des siens, et des épaules il me fait écran. Blond, ça, oui. Et il sent bon, mais son odeur ne reste pas sur mes vêtements ; c’est un gentleman. Un sourire et il me laisse dormir, voilà c'est tout, un bisou bien chaste sur la joue et un signe de la main depuis le couloir. Je ferme la porte et je laisse libre cours à mon sourire à moi.
C’est la première fois qu’on me courtise, dis donc. Quelques jours plus tôt j’avais goûté sa bouche, mais quand ses deux mains sont passées sous mes vêtements et que je les ai arrêtées, il m’a dit d’accord. Quand j’ai dit on verra bien il était encore d’accord. Je parle de temps, je parle d’attente, je le traite d’inconnu, et il dit oui. Il revient le lendemain et il vient me chercher à la sortie des cours, et il ne tente rien. Il me prend la main et il me laisse babiller.
Alors moi, je suis un peu étonnée de pouvoir m’émerveiller de si peu de choses encore. Je repense au lycée, à Lena, bien décidée à ne pas m’enflammer sur ce qui peut advenir. Je n’écris pas le futur et je ne m’imagine pas le présenter à mes parents. Je profite juste (hé, putain, je profite, merde alors, j’en reviens toujours pas !) de ce qui s’installe, de ce qui pourra peut-être bien s’avérer être un début, ou bien de ce qui restera deux parfaits rendez-vous et puis rien. Voilà.