J'écris plus beaucoup (mais avec un peu de chance je pourrai participer à l'atelier d'écriture de mon école alors j'ose espèrer que ça va me redonner l'impulsion nécessaire) mais je dessine
mariondessine.blogspot.fr/

Samedi 12 octobre 2013 à 21:44

On nous pousse à écrire nos histoires et nos conneries et à penser que quelqu'un va lire et s'y intéresser, « on » comme une puissance supérieure, car tout ça s'est déversé sur nous sans que nous puissions vraiment mettre le doigt dessus. Être un individu c'est dur, moi tout ça ça me donne envie de laisser tomber. Moi je me crois unique et parfois dans la glace à défaut d'un beau visage je vois du talent, moi je me crois sensible et fine, je donne de l'importance à mes émotions, j'écoute mon regard et je ne laisse jamais les histoires s'arrêter dans ma tête, parce qu'à l'intérieur de moi c'est plus intéressant que dans la bouche des autres. Sans arrêt il y a cette idée de potentiel, parce que si je suis géniale, ça ne se voit pas beaucoup. J'oscille entre le délire poétique et la conscience hyper-active et la misère la plus noire, à chier de banalité dans une rue grise. Et puis au passage clouté suivant ça explose de couleurs dans ma tête et je crie : vous ne savez rien du tout pauvres cons !

Mais qu'importe, je ne fais rien de plus que tous ces autres génies, je me souviens que dans leur tête aussi ça se croit le centre du monde, nous sommes tous le centre du monde, il y a foule et ça se marche sur les pieds.

J'aimerais bien être ailleurs, autre part et autre temps, quitter le centre du monde et voguer à la périphérie, m'oublier un peu, abandonner l'usine. Congé forcé, coma, voir la beauté du monde autrement qu'à la première personne.

Samedi 5 octobre 2013 à 17:33

Ce qui suit c'est pour moi, ce n'est pas pour vous, il n'y a rien à en tirer, mais je me sens mieux d'avoir écrit ça.   

Je ne sais plus écrire
Je sais encore écrire mais je n'ai rien à dire. Rien qui n'aurait déjà été dit. Je refuse de me laisser aller ici à l'apitoiement, à l'autoflagellation, non parce que c'est ainsi qu'est mon caractère – volontaire, désabusé, positif – mais parce que présenter la preuve que je suis geignarde et molle aussi explicitement dans un espace blanc, me rebute. Je laisse ça un peu fuyant dans ma tête et dans mon corps. Ça me cloue au sol, à mon lit pour aujourd'hui, mais ça va passer. Je crève de peur et de dégoût, mais il y aura bien un jour où je me relèverai, m'écriant youpi face à ma fenêtre giclant de soleil levant.

(Ma fenêtre ne gicle jamais le soleil levant, face à ma fenêtre il y a un autre mur et un toit couvert de fientes.)

En attendant, j'attends. J'attends j'attends j'attends, ni patiente ni impatiente, mais dans une angoisse dévorante, que quelque chose se passe, un mouvement au coin de mon œil, une beauté un geste quelque chose. Attendre c'est couard, mais m'agiter dans tous les sens et faire semblant de savoir quoi leur dire à tous qui se croient talentueux (et la plupart le sont) ; les veinards, qui rient un verre de mauvais blanc à la main, liant connaissance avec les petits nouveaux et renouant avec les anciens, faire semblant ça me tue.

Et certains le comprennent : il y a Lucile et Nathalie, qui m'emmènent au cinéma et m'écoutent quand je parle.

Quand j'aurais fini d'attendre, il n'y aura plus la flagellation ni l'apitoiement, il n'y aura que le calme et le mouvement, et le désir de faire quelque chose qui compte, et de dire et de sentir ; en attendant, j'attends.

Samedi 5 octobre 2013 à 17:17

 Parfois la simple mention de mon frère amène des larmes à mes yeux.

Dimanche 29 septembre 2013 à 13:14

Je n'avais pas marché dans le centre ville depuis des mois. Pas dans cette grande rue en pente, en tout cas. Ce qui vient n'est pas de la nostalgie ; simplement la tristesse abstraite d'être étrangère à ce qui était si familier.

Les pavés mouillés, la sculpture au beau milieu de cette toute petite place – deux danseurs en extase, deux danseurs en éternelle agonie – et le poids de la grande baraque sur la gauche, et moi qui dérape et glisse hors du temps. J'ai douze ans, j'en ai seize, je pleure, je souris. Précédemment, mille respirations. Je presse le pas pour me régler sur mon allure de petite fille pressée et en retard. Mon cours de piano commence dans cinq minutes et dans mon ventre l'angoisse : ce morceau toujours pas apprivoisé.

Puis tout s'arrête, au moment où je me rappelle cette petite fille. À l'instant même où je me souviens de l'angoisse et de l'impatience, je dérape encore et m'étale contre les pavés. Je m'arrête et tourne la tête vers le conservatoire de musique, tentée d'y entrer, de voir ces salles cacophoniques. Mais je n'aime pas ces pèlerinages toujours décevants, je sais ce qui m'attend : un décalage embarrassé dans ces couloirs soudain rétrécis, un malaise face à Madame Toledano et sa toute petite bouche peinte qui bat la mesure, la peine soudaine parce que cet univers qui était si rassurant fonctionne à présent tout seul sans moi, glissant à toute vitesse le long des fortissimo et des dopio et des stretto tandis que mon piano me colle aux doigts.

Je ferme les yeux et trace dans ma tête ce qui a disparu, le carton écaillé à l'entrée de cette porte ouvragée, magnifique et d'un autre siècle, où est dessinée une portée et quelques lettres en notes dansantes : ENMD, et puis le visage de mon professeur de piano se reflétant à droite de la partition, et les caves interdites que nous visitions en secret l'été, et la bataille d'eau sous les fenêtres, et le parc rempli d'orties et de fraises des bois.

Samedi 14 septembre 2013 à 14:35

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